Obsession : insurrection. Ousmane Sonko une nouvelle fois repris par ses vieux démons ? Entre violence, défiance et outrance, son énième appel à défier l’Etat et les lois de la République ressemble à s’y méprendre, à une énième tentative d’amener les conséquences de ses déviances sur le terrain de l’incitation à l’insurrection.

Coincé entre le marteau Mame Mbaye Niang et l’enclume Adji Sarr, la pression de ces deux affaires judiciaires pourrait avoir un gros impact non seulement sur son avenir politique immédiat, mais aussi sur son image de parangon de vertu. Le président du parti Pastef miserait-il sur l’insurrection pour plonger le Sénégal dans le chaos ? Compterait-il sur la terreur pour figer le pays dans une spirale de destruction institutionnelle, économique et sociale dont nous mettrons plusieurs années à nous relever ?

Ces questions, qui risquent de déclencher l’ire de la brigade radicale du parti Pastef, n’ont rien de tendancieux. Et pour cause, le dangereux appel de Ousmane Sonko lancé à ses partisans les plus fanatiques dont le niveau de férocité jusqu’au-boutiste ne cesse de monter à la verticale, à descendre massivement dans la rue, avec ou sans autorisation, pour l’accompagner au Tribunal ce jeudi, avec tous les risques graves d’affrontements, n’a rien d’anodin. Il est révélateur d’un aveuglement destructeur d’une stratégie attentoire à la forme républicaine de l’Etat. Je veux bien accorder au patron du parti Pastef le bénéfice du doute lorsqu’il se fait passer pour un prophète de la non-violence, mais tout porte à croire que sa posture de plus en plus extrême face aux circonstances risque de tracer un sillon sanglant dans la trajectoire politique de Monsieur Sonko.

Après le déclenchement de son «mortal kombat» contre Macky Sall, n’est-ce pas lui qui déclarait le 22 janvier dernier, lors d’un meeting à Keur Massar dans la banlieue dakaroise : «J’ai déjà fait mon testament et je suis prêt à faire face à Macky sur tous les fronts. S’il ne recule pas, soit il nous tue, soit nous le tuons», non sans demander «à ses militants de se préparer et de rester à l’écoute».
Le 17 février, il faisait encore étalage de toute son inspiration menaçante : «On s’approche dangereusement de la ligne rouge. Celui qui observe, et ne dit rien, doit savoir qu’il ne sera pas épargné.»

Sa dernière éruption contre la République qu’il appelle à défier sur toute l’étendue du territoire sénégalais, n’est que le bouquet final de la fuite en avant d’un homme qui non seulement traîne un lourd passif de déclarations destructrices de nos institutions en s’attaquant à la Justice, la police, la gendarmerie, à l’Armée et à tous les symboles de la République, mais qui semble surtout avoir perdu tous ses repères républicains.

En politique, le verbe signe souvent les intentions. Voudrait-il que nous décelions derrière la violence des mots, des velléités factieuses servies par une réthorique au service de la terreur et du vandalisme institutionnel qu’il ne s’y prendrait pas autrement. C’est moi ou le chaos. Un fantasme nommé Sonko.
En instruisant de manière presque compulsive, le procès en illégitimité de la magistrature sénégalaise à le juger, Ousmane Sonko s’est débranché du système républicain et démocratique national au point d’en devenir le principal danger. De là à penser que le président du parti Pastef a un problème sérieux avec la démocratie. Qu’il est une grossière supercherie politique et populiste pour qui chaque fin justifie chaque moyen, prêt à tous les coups de force pour renverser l’ordre constitutionnel, il y a un pas que peu de gens osent franchir publiquement par peur de représailles.

En démocratie et en République, la légitimité de l’exercice du pouvoir vient de l’élection et non de l’insurrection. Son appel à ses partisans à descendre dans la rue «avec ou sans autorisation», s’il est entendu, sera lourd de conséquences.
Quels que soient les verdicts des procès auxquels Ousmane Sonko fera face, ils ne seront que l’extension judiciaire d’une adversité qui a dépassé les limites de l’opposition politique.

Dans un climat passionné et un contexte de raidissement politico-médiatique où la moindre étincelle peut provoquer une grosse déflagration, les certitudes politiques sénégalaises n’ont jamais eu la vie aussi courte.

Surtout pour Ousmane Sonko qui joue à quitte ou double. Se voir en martyr ou en Président. Sauf qu’il risque de louper tous les deux. Car avec deux affaires pendantes devant la Justice, sa fragilité politique prend une allure de plus en plus palpable.

Ce qui ne lui donne pas le droit de faire basculer le Sénégal dans la violence, la mort et la destruction. Personne n’a le droit de mettre le pays à contretemps de la stabilité.

Brûler le Sénégal pour accéder ou conserver le pouvoir est un calcul perdant à tous les coups.

Le sang des enfants de notre pays ne doit pas servir à étancher la soif de privilèges d’hommes et de femmes dont le seul objectif est de nous assujettir à leurs désirs de pouvoir.

Malick SY
Conseiller en communication