Au Sénégal,les facultés ont été incendiées en plein jour,où étiez-vous?
Chers intellectuels, les sénégalais de bonne foi ont été surpris et peinés de voir une liste d’intellectuels, donnant des leçons de droit aux autorités de l’État. N’ayant pas vu la signature d’éminents Professeurs, permettez-moi de douter jusqu’à preuve du contraire qu’ils ne soient mêlés de près ou de loin à cette démarche qui n’honore pas votre mission.
L’écrasante majorité de vos collègues de Facultés entières et des Instituts d’université ont apparemment refusé de s’associer à ce mouvement qui tend à faire de nos intellectuels, de notre espace universitaire, une banale permanence politique.
Honte à vous d’avoir profané l’esprit des parrains qui ont pour noms Cheikh Anta Diop, Gaston Berger, Assane Seck, Alioune Diop, El hadji Ibrahima Niasse, Amadou Makhtar Mbow, Amadou Hampathé Ba, Iba Der Thiam (merci M. Président de la République pour Thiès) ! Honte à nous d’avoir eu la prétention d’être plus patriotes et plus savants que nos illustres aînés que sont Iba Der Thiam, Abdoulaye Bathily, Ibrahima Fall, Kalidou Diallo, Sémou Pathé Guèye qui n’ont jamais fait circuler des pétitions comme démarches politiques d’opposition à l’intérieur de notre espace universitaire, en vue d’entraîner leurs collègues dans le but d’assouvir leurs ambitions politiques ou donner des leçons de juridisme et de démocratie aux différents régimes. Bien au contraire, quand ils ont senti le besoin de s’opposer aux autorités politiques en place, ils sont carrément descendus dans l’arène politique avec leur foi militante, pour s’attaquer à visage découvert aux pouvoirs politiques du moment, en vue de faire triompher leurs idées et leurs positions idéologiques et doctrinales.
Les illustres aînés, dans les conditions que l’on sait, ont porté haut le flambeau de la science et de la connaissance de notre élite intellectuelle, la première source de lumière de l’Afrique noire francophone. Tous les pays de l’Afrique occidentale envoyaient leurs meilleurs étudiants, fréquenter nos amphithéâtres, nos salles de cours ou s’inspiraient de notre élite.
Depuis sa création et pendant près de quarante ans, notre Université a constitué un foyer ardent pour des générations d’intellectuels et de chercheurs dont les travaux faisaient autorité dans tout le continent.
Hélas, vous n’avez pas su maintenir ce dynamisme, au moment où les conditions matérielles n’ont jamais été aussi bonnes, la fonction revalorisée, des avancées significatives injectées par le Président Macky Sall dans plusieurs leviers de l’enseignement, encore une fois merci M. le Président ! Pire nos intellectuels ont entamé une descente vers une sorte de déclin inexcusable et inexplicable, malgré les quelques succès individuels au CAMES ! Et d’ailleurs les meilleurs d’entre vous, voyant que les Etats africains n’envoyaient plus leurs étudiants au Sénégal, ont saisi l’occasion pour aller monnayer leurs talents dans les autres universités africaines de création récente au détriment de la qualité de l’enseignement supérieur dispensé au Sénégal.
Et quand ils ne trouvent pas de vacations dans ces universités, ils organisent dans ces pays des séminaires pour augmenter leurs ressources financières. Ils s’arrangent toujours pour consacrer moins de temps à l’enseignement Sénégal pays où ils sont pourtant titulaires de postes universitaires.
Résultat : notre Université ne figure même pas sur la liste du dernier classement des meilleures universités du monde ! sur 140 signataires moins du dixième ont produit des manuels de portée universelle pour servir de support à leur enseignement. Vous êtes encore à l’ère des cours polycopiés que les Presses Universitaires de Dakar ne veulent même pas éditer par peur du ridicule.
Quant à la recherche scientifique, faire un tour à l’Ifan ! D’après ce que je sais toutes les publications issues de la recherche fondamentale sont plus âgées que presque chacun d’entre vous. Quel désastre !
Face à de tels défis qu’avez-vous fait chers intellectuels ? Quelles solutions avez-vous proposées à l’Etat ? Rien que de la diversion et de la fuite en avant en voulant maladroitement porter la toge des donneurs de leçons aux pouvoirs publics, qui exercent la lourde mission de mener les affaires de l’Etat, au service des populations, dans des conditions pénibles, mais toujours au nom de l’intérêt général.
Chers intellectuels ! Revenez à vos obligations de transmission du savoir et remplissez vos devoirs de sous-tendre vos enseignements par une recherche fondamentale et appliquée à nos sociétés. Voilà le débat.
Habib Ndao.
Ancien étudiant de l’Université de Dakar, Ancien étudiant de l’Université de Lyon II
Ancien étudiant de l’Université de Dijon